Le garçon doré
Voilà plusieurs mois que je me promets de parler de ce petit recueil, qui n’a pas reçu toute la publicité qu’il mérite.
Vous avez sans doute croisé le nom d’André- François Ruaud si vous vous intéressez un minimum à l’imaginaire et aux littératures populaires : berger de l’excellente maison d’édition Les moutons électriques, initiateur de la revue Yellow Submarine, présentateur acharné des petits maîtres de la fantasy dans la revue Faërie, auteur d’un très beau guide de la fantasy (Cartographie du merveilleux) et co-auteur de non moins intéressants essais sur la SF (Science-Fiction, littérature du réel et Science-Fiction, les frontières de la modernité), fin connaisseur de la littérature populaire (découvrez les arcanes de la Bibliothèque rouge !) ayant ressuscité la revue Fictions… On le connaît avant tout pour ses talents de passeur, bien qu’il soit également un excellent créateur de fictions (notamment pour la jeunesse), ce que ce beau recueil démontre amplement.
Sous sa magnifique couverture (premier appel au rêve !), Le garçon doré enferme huit micro-pépites : peu importe le genre littéraire qu’on souhaitera leur coller (fantastique ? fantasy urbaine ?) car elles les dépassent largement. C’est un recueil que l’on peut mettre dans les mains d’un amateur de ces genres autant que dans celles d’un novice complet : le genre n’y est souvent qu’un prétexte à cerner la fugacité d’une émotion, la lueur d’une sensibilité.
Huit nouvelles, donc, qui nous entraînent dans une géo- temporalité si personnelle que l’on a l’impression de lire des souvenirs plutôt que des récits. Que l’on se promène dans le Londres de 1920 ou de 1999, dans le Pays de Retz des années 60 ou dans le San Francisco de 1996, que l’on suive un curieux garçon doré, des anges en rollers ou un simple paysan, l’impression demeure : ces nouvelles sont les ley lines d’une sensibilité. Ils relèvent de la vision plus que du récit – mes textes préférés sont d’ailleurs ceux qui nous donnent à voir une trouée de fantasme, plus qu’une histoire à proprement parler.
C’est que l’écriture est belle et évocatrice : elle sait capturer les détails des villes et des êtres et les faire vibrer dans les fils du texte. Sa finesse nous entraîne vers les éclats de cet Ailleurs que l’on désire, fantasme, touche du bout des doigts tout au long des nouvelles et qui sert de fil d’Ariane au recueil. On est tour à tour enflammé et mélancolique, à suivre ces curieux éclats d’âme, ces fenêtres vers l’Autre. C’est une lecture précieuse, que j’ai eu plaisir à renouveler au fil de ces derniers mois, me perdant dans D’or et de ciel, Imago, suivant Diane, Cliff et les autres dans les interstices merveilleuses du texte et des reflets de mondes chantés par Ruaud.
Une lecture que je vous recommande chaudement, pour ses (nombreuses) qualités, mais aussi parce que l’acheter permet de soutenir un micro-éditeur qui a un bien joli catalogue. Si vous souhaitez le commander (il faut aller sur ce site), n’hésitez pas à le feuilleter et à vous laisser séduire : ce sont des publications choisies avec un œil qu’on devine exigeant et acéré !
4 commentaires
Je viens d’aller sur le site de la clef d’argent. Merci pour la découverte que j’ai appréciée.
J’ai commandé le garçon doré.
Il ne me reste plus qu’à te remercier pour ta confiance et à te souhaiter une très belle lecture !