Revue Dissonances : Le vide
La revue Dissonances, pour son vingt et unième numéro, explore le thème du Vide. Sous les étranges et fascinantes illustrations de Pauline Dunand (seule artiste à illustrer les pages) et les textes de dix-neuf auteurs, celui-ci choisit diverses incarnations : vacuité d’une vie en négatif, dans un univers dystopique où les jours perdent leur substance et leur nom (très beau texte d’ouverture de Derek Munn), l’urgence d’embrasser la tentation du gouffre, du suicide, pour mieux atteindre le vide/ la paix intérieur(e) (dans le superbe texte angoissé, cœur emballé, où l’écriture reflue et s’écrase comme quelqu’un qui interromprait sa course, d’Isabelle Guilloteau), les derniers instants avant que l’âme ne se déleste du corps (très beau Saut de l’ange, de Jean-Marc Flapp), la beauté physique comme possible enveloppe creuse (Marina Louvette), l’apaisement d’après l’amour (sensible et fin texte de Nicolas Brulebois), le vide créateur (Alain Condrieux), celui de l’attente, de la projection amoureuse (Véronique Decaix), vide d’après la naissance (Thibault Marthouret), inépuisable vide d’Antonin Artaud (excellent et passionnant texte de Pascal Gibourg)…
Si certains textes m’ont semblé plus faibles (je pense au Quart d’heure syndical de Thomas Vinau qui, malgré une idée assez juste – explorer le vide du traintrain du monde de l’entreprise-, ne parvient pas, à mes yeux, malgré son écriture sèche, à incarner son texte, à Mes chers concitoyens, de Françoise Biger, qui m’a paru, lui aussi, être un chouette concept – explorer le jargon ronflant et privé de sens des politiques- dont l’écriture ne m’a pas touchée ou au Soleil balsamique, d’Isabelle Mayault, trop fugitif à mon goût) ou relever de l’exercice de style (ainsi le texte en plein, sans espaces de Nicolas Vargas C., dont le procédé m’a amusée mais dont les retombées sont moindres comparées à celles d’autres textes, ou les expérimentations hermétiques de Philippe Jaffeux ou Rosa Yemen, qui m’ont laissée perplexe), si certains m’ont laissée froide (je n’ai pas réussi à m’approprier le poème d’Isabelle Grosse, ni le texte de Catherine Chantilly) quand certains me transportaient (superbe Alexie de Kaliane Ung et envoûtant poème de Charles Singher), la diversité des plumes, des approches m’a vivement intéressée.
S’ouvre, après ces explorations du Vide, la section Résonances : on y trouve une interview d’Abdel Hafed Benotman (dont les réponses, mordantes et drôles, me donnent envie de découvrir l’auteur), quatre passionnants regards croisés autour du Park de Bégout (permettant de profiter de la belle, sensible et fine plume d’Anne-Françoise Kavauvea), six critiques de livres publiés chez de petits éditeurs (titres que je me suis empressée de noter, pour ceux qui m’étaient inconnus, dans mon inextinguible liste de livres à acheter) et une dernière rubrique, « à lire, voir, ouïr », où les auteurs du numéro invitent à découvrir un livre, un disque et un film (choix qui éclairent, parfois, certaines références ou influences d’écriture).
On referme la revue avec le sentiment d’avoir exploré une mine, à richesses inégales, certes, mais avec une belle volonté d’offrir un tremplin à de nouveaux auteurs et à une conception moderne et exigeante de la littérature.
Merci pour l’envoi !
4 commentaires
On est d’un avis assez similaire finalement, contrairement à ce que tu m’avais laissé entendre. Les mêmes enthousiasmes et les mêmes perplexités, à peu de choses près, sauf sur les illustrations.
Ma critique de ce numéro de la revue ici:
http://lepandemoniumlitteraire.blogspot.com/2011/11/revue-dissonances-numero-21-hiver-2011.html
Effectivement ! J’avais l’impression d’être plus tranchée sur certains textes mais, en les relisant et en rédigeant, finalement… il n’y a que le Guilloteau qui nous sépare !
Cela fait 2 critiques (avec cette de Marianne Desroziers) que je lis de ces Dissonances, allez ! vous m’avez convaincu, je vais m’y abonner.
Ils sont aussi à la recherche de textes pour le prochain numéro… ;-)