Le Vampire Actif
C’est sous l’égide de Michel Tournier et de son Vol du vampire qu’est née cette maison d’édition, qui, depuis 2007, accomplit un formidable travail de passeuse de littérature.
Défricher les vides de l’histoire littéraire ou ses zones d’ombre, remettre en avant des écritures préfigurant la modernité à venir ; saisir la littérature dans toute son amplitude (les expérimentations & les jalons qui les permettent), dans toutes ses exigences, offrir à la contemporanéité la chance de se faire classique à venir ; défendre une vision construite et constructive de la littérature, par des textes forts & des analyses qui ne le sont pas moins ; proposer au lecteur de dépasser le rôle de récepteur-consommateur auquel on le condamne, pour devenir cette force active qui entre en dialogue avec le texte…
Tels sont les credo que se sont fixé les deux tenanciers de cette belle maison, deux passionnés à l’âme ardemment chevillée à la littérature dans toute sa pluralité. Que ce soit ici chaleureusement salués Hugues Béesau et Karine Cnudde qui, par leur noble engagement, leur curiosité insatiable, leur culture immense et leur passion lumineuse, nous permettent de prolonger & élargir nos paysages littéraires.
Que l’on se plonge dans leurs rituels pourpres (oeuvres oubliées, à la modernité & à la langue toujours surprenantes : escales lycanthropiques de Pétrus Borel, truandailles gouailleuses de Jean de Richepin, et, tout bientôt, orgie latine selon Félicien Champsaur – l’ouvrage est actuellement en souscription, vous pouvez en lire une savoureuse présentation ici) ; leurs séditions (écritures contemporaines, oscillant entre l’expérimentation frondeuse – les Siamoises de Patrick Dao-Pailler, terrible labyrinthe tératologique- et une langue vibrant d’une richesse toute classique & pourtant abouchée à la modernité – celle, préférée entre toutes, de Lionel-Edouard Martin) ; leurs entretiens (ainsi Eric Bonnargent livre-t-il un élégant traité de bifurcation littéraire) ou leurs échappées poétiques (tableautins d’une vie en poésie, chez Lionel-Edouard Martin, fragments à la sensibilité aigüe chez Véronique Gentil), c’est une vision vivante, vibrante, de la littérature qu’on nous propose.
Y domine l’exigence de la langue : riches retenues, foisonnements baroques, expérimentations interrogeant l’acte de création, pur classicisme, gouaille sombre ou lumineux silences, le lecteur trouve ici de quoi satisfaire ses appétits réflexifs comme ses envies d’éblouissement.
Y règne une belle intelligence et générosité littéraires : outre leurs beaux ouvrages (précieux objets au papier froufoutant, refermés sur leurs magnifiques marque-pages), Karine Cnudde et Hugues Béesau diffusent sur leur excellent blog, le Vampire Réactif, ou à travers l’Association du Vampire Actif, leur belle vision et connaissance du littéraire, en appelant à la défense de son patrimoine et à la plus large diffusion d’œuvres méconnues & essentielles, proposant à la vivacité du lecteur un espace de réflexion riche, étayée, vivace.
N’hésitez pas à souscrire aux projets de cette maison qui ne vampirise ses lecteurs que pour mieux enrichir leurs horizons littéraires !
Note au lecteur désireux de se convaincre des qualités littéraires des œuvres portées par Karine Cnudde et Hugues Béesau : il peut en lire trois critiques sur De Litteris (dont une notule faisant partie d’un ensemble de suggestions ici) et pourra voir l’intégrale du catalogue commenté dans les prochains mois.