Le dodo de Lewis Carroll
C’est un adorable objet avant même d’être un livre : on savoure, avant de plonger dans cette histoire minuscule, le grain du papier, le pourpre éclatant de la jaquette, les points délicats de la couture (à voir tant et tant de livres collés aujourd’hui, on en oublie parfois qu’ils furent d’abord cousus…), la maquette amusante de ce livre qui se déplie, se replie, se tourne… un livre-jeu, autant qu’un livre objet !
Se déploie ensuite l’histoire, fort courte, qui contera aux enfants comment le révérend Charles Dodgson, ce drôle d’oiseau bègue, rencontra un jour le dodo qui devait, bien plus tard, une après-midi de pluie, devenir l’un des personnages de son double chef d’œuvre, cette Alice en deux tomes, toute de réjouissantes absurdités et invraisemblances linguistiques. Le (bien) court récit est accompagné de gravures sur gomme pleines d’une tendre drôlerie, qui redoublent et éclairent agréablement le texte.
C’est un joli ouvrage, qui peut faire office d’introduction à Alice comme d’initiation à la création littéraire : l’auteur met en scène le rapport complexe que Dodgson entretenait avec le langage et avec le monde extérieur et amène avec justesse le moment où il transmute ce problème en or littéraire et transforme le timide révérend se cachant derrière les mathématiques et la photographie en Lewis Carroll.
On le conseillera aux Pères Noëls souhaitant jouer les passeurs littéraires, qui pourront également piocher d’autres curiosités dans le beau catalogue des éditions Esperluète.
Livre découvert à l’occasion de l’excellent salon L’Autre Livre.