Roma, l’avventura et autres nouvelles
Roma, l’avventura propose, en quatre nouvelles comme autant de destinations différentes (Rome, Paris, Florence, Athènes), un portrait évolutif d’une femme « moderne », Claudia, désireuse de s’accomplir à tous points de vue : personnel, professionnel, et artistique.
Au fil de ses aventures, Sylvie Ferrando donne son interprétation de ce que c’est qu’être femme aujourd’hui : amante autant que mère, européenne, ambitieuse, indépendante, libre, courageuse, et en harmonie avec sa fibre artistique. La femme selon Ferrando (qu’il s’agisse de son héroïne, Claudia, ou de Calypso, un des personnages de la dernière nouvelle) s’offre volontiers reconversions, voyages, rencontres, approfondissement intellectuel ; sa fragilité recouvre une force intérieure qui l’aide à surmonter bien des obstacles ou à s’emparer de bien des opportunités. Amour, amitié et carrière épanouie l’attendent à chaque tournant, effaçant bien vite les échecs ou les épreuves.
Le projet me semblait intéressant – défendre une vision moderne de la femme -, mais je n’ai pas réussi à m’immerger dans cette succession d’aventures trop parfaites que traverse l’héroïne, qui, malgré des déboires personnels ou professionnels, m’a semblé subir une trajectoire trop lisse et évoluer de façon trop rapide. J’aurais aimé plus de rugosité et moins de rêve rutilant, plus d’inquiétude face à la possibilité d’un échec, et moins de facilité : malgré le surgissement du deuil, des oscillations professionnelles ou des doutes artistiques, Claudia me paraît suivre trop aisément une destinée-fantasme de papier glacé, et n’évoque que trop peu les difficultés qu’il y a à être femme aujourd’hui.
L’écriture m’a elle aussi parfois gênée : que ce soit lors de la première nouvelle, où des incises-citations interrompent parfois brutalement le fil du récit et sont trop nombreuses pour créer un réel effet d’échos aux références culturelles évoquées, ou la volonté didactique, parfois trop appuyée, qu’a l’auteur de partager certaines connaissances – on assiste tantôt à de forts complets exposés sur les Etrusques ou le théâtre grec antique, tantôt à des excusions géographiques, certes instructives, mais malvenues dans le récit. Ce désir d’enrichir le background culturel de l’héroïne, pour ne pas produire un énième Bridget Jones ou en écrire une version plus intellectualisée, est certes louable, mais il entrave le rythme de la narration : il aurait gagné à être inséré de façon plus vivante au sein du récit.
Mais sans doute ne suis-je pas, pour commencer, la cliente idéale pour ce genre de livres ; une lectrice amatrice de littérature féminine émaillée de références culturelles saura davantage se laisser séduire par l’ascension de Claudia que je ne l’ai été. Elle pourra peut-être prolonger avec plaisir sa lecture par une biographie de George Sand, qui pourrait être le modèle en creux de Claudia : passions amoureuses, engagement politique, fibre littéraire, maternité contrariée, modernité – faut-il rappeler que George Sand fut une des premières femmes à diriger une exploitation agricole ?-, européanisme aigu… la trajectoire est la même, à croire que la géniale Aurore Dupin a bercé de son ombre la plume de Sylvie Ferrando.
Livre reçu en service de presse.